Acteurs et actrices des musicologies francophones

Bilan historiographique

Au-delà des hommages régulièrement rendus aux musicologues récemment décédés dans les rubriques nécrologiques des différentes revues, des études monographiques ont été entreprises sur des figures de la musicologie et sur leur production écrite, qui ont pu faire parfois l’objet d’éditions critiques. C’est le cas de musicographes du xixe siècle comme Joseph d’Ortigue et Guillaume-André Villoteau (L’Écuyer 2003, Grinevald 2014), de critiques musicaux influents comme Boris de Schlœzer (Picard 2011). Plusieurs musicologues « professionnels » ont également fait l’objet d’articles, à l’image de Jules Combarieu et de Pierre Aubry (Campos 2006), de Jacques Chailley (Bartoli et Musurgia 2012), de Vladimir Jankélévitch (Bartoli 2010). D’autres ont fait l’objet de travaux collectifs de plus grande ampleur, ainsi Henry Prunières, Solange Corbin (Chimènes, Gétreau et Massip 2015 ; Cazaux-Kowalski, His et Gribenski 2015) et Romain Rolland, dont l’œuvre musicologique fera prochainement l’objet d’un colloque (« Romain Rolland, musicologue et écrivain de l’intime », 17 au 19 novembre 2016, BnF, Université Paris-Sorbonne, Vézelay). De même, des travaux sur certaines figures de l’ethnomusicologie ont été engagés. On compte parmi les plus notables ceux consacrés à Claudie Marcel-Dubois (Cheyronnaud 1990), Constantin Brăiloiu (Viret 2010), ou encore André Schaeffner (Roueff 2006). Un regard porté sur les dates des ouvrages répertoriés dans la bibliographique permet de considérer l’intérêt aujourd’hui manifeste pour ces figures comme une tendance nouvelle dans la musicologie française, qui émerge depuis les années 1990 pour se développer de manière plus décisive au cours de la décennie suivante. Toutefois, aucune étude systématique de type prosopographique n’a jamais été entreprise à ce jour.

Objectifs de l’axe

S’il ne peut être question de faire un recensement exhaustif des musicologues ayant écrit en langue française, du moins dans la première étape du projet, plusieurs de ses membres ont proposé d’établir une prosopographie des musicographes et musicologues dans des bornes chronologiques qui correspondent à leurs centres d’intérêt immédiats, d’une part, et qui tiennent compte de la diponibilité des sources, d’autre part. Cette première tranche des travaux s’articulera en deux volets : —les musicographes morts avant la Seconde Guerre mondiale, —les femmes musicologues nées avant 1914. Cette recherche consistera en la rédaction de fiches bio-bibliographiques sur chacun des auteurs à partir de leurs écrits, de leur correspondance, des nécrologies, des archives publiques ou privées, etc.

Cette recherche permettra d’établir les fondements d’une archéologie de la discipline tout en fournissant une architecture de base nécessaire à la conduite globale du projet. La première journée d’étude consacrée aux femmes musicologues organisée par le groupe GEMM (Genre, Musique et Musiciennes) de l’IReMus le 11 mars 2016 (Femmes musicologues francophones de Michel Brenet (1858-1918) à Solange Corbin, 1903-1973) a ainsi démontré l’intérêt de ces enquêtes biographiques qui font apparaître aussi bien les filiations et les réseaux nationaux et internationaux de formation et de collaboration, que l’émergence de structures institutionnelles publiques ou privées.